Dans In Extremis, imaginé par Juan Rodriguez et Julien Prothière, illustré par Stéphane Escapa et édité par Jeux Opla, on tente d’aider une intelligence artificielle à trouver des solutions pour la transition énergétique.
L’appli vous appelle, ordonne, presse : il faut réagir vite, poser les bonnes cartes, alimenter le système sans provoquer la panne ni polluer.
Seize expériences, trois manches chacune, une tension continue : on coopère sous contrainte, on improvise, on crame des cartes comme des ressources fossiles.
Ici, pas de jetons en plastique ni d’effets de manche : juste du rythme et du stress.
Le temps passe, la broyeuse s’active, les voix s’élèvent ; et quand la machine se tait enfin, il reste un silence plein de sueur et de satisfaction coupable.

Chez Jeux Opla, on ne publie pas des jeux pour meubler les étagères : on les pense comme des manifestes.
In Extremis est signé par Juan Rodriguez (Les Poilus, Tracks, Cartzzle, Décrocher la Lune, Silex and the City – Le Jeu) et Julien Prothière (Kosmopolit:t, Take Time, La Marche du Crabe, Fil Rouge, Dream On!).
Deux auteurs qui connaissent par cœur la mécanique du collectif : Rodriguez a toujours écrit sur la solidarité en temps de crise (Les Poilus reste une référence), tandis que Prothière maîtrise l’art du chaos organisé (Kosmopolit:t en est la preuve sonore).
Réunis, ils transforment la transition énergétique en une expérience d’urgence partagée : un jeu où l’on coopère, débat, se contredit, avant que la lumière s’éteigne.

Les illustrations sont de Stéphane Escapa (Cap’taine Carcasse, Pom Pom, La Marche du Crabe). Son trait rond, clair et humain évite le clinquant : un graphisme artisanal au service du stress collectif.

Sorti en 2024, le jeu a été conçu avec l’ADEME, le POLAU – Pôle Arts & Urbanisme, Incub et Les Effets Papillon.
Fabriqué en France, sans plastique, In Extremis reste fidèle à la ligne éditoriale d’Opla : du jeu local, réfléchi, ancré dans le réel.

Procédure de survie énergétique

Dans In Extremis, les joueurs incarnent une équipe du G.I.E.T.E.
(le Groupement International d’Experts de la Transition Énergétique).
Leur mission : aider une intelligence artificielle à trouver des solutions à la crise énergétique mondiale, en lui fournissant les bonnes combinaisons d’énergies — sans trop polluer, ni gaspiller.

Le tout se joue en temps réel, grâce à une application (ou un totem sonore) qui agit comme une IA :
elle appelle les joueurs un par un, leur donne des ordres, des priorités ou des urgences à traiter.

La partie se divise en trois manches, appelées « Expériences ».

• Chaque manche représente une crise énergétique à résoudre.
• Les joueurs disposent de cartes Énergie (renouvelable, fossile, etc.) qu’ils doivent poser sur les bons « onglets de besoins » annoncés par l’application.
• Quand la somme des valeurs demandées est atteinte, l’objectif est validé.
• Mais attention :
  • utiliser trop d’énergie polluante ajoute des cartes Pollution dans la pioche ;
  • trop produire crée du gaspillage (on perd des cartes utiles) ;
  • et manquer d’énergie fait tout simplement échouer la manche.

Après chaque manche, on « nettoie » le jeu : les cartes mal jouées vont dans la Broyeuse à papier, symbole de gaspillage, et on prépare la manche suivante.
Pour gagner, il faut réussir les trois manches consécutives.
Un seul échec = blackout général.

Sur le fil du watt-mètre

Le vrai moteur d’In Extremis, c’est le temps réel.
Pas de tour de jeu posé, pas de réflexion lente : l’application dicte le rythme. Elle annonce les ordres, lance le chrono, et choisit aléatoirement qui doit agir. Dès qu’elle t’appelle, tu n’as que quelques secondes pour réagir : jouer une carte, coordonner avec les autres, ou paniquer.

Chaque manche devient une mini-crise sous tension. L’IA donne des consignes absurdes, change de ton, accélère. On obéit, on improvise, on se hurle des infos :

Tout se passe dans un flux constant : les cartes se posent, la pollution grimpe, la broyeuse avale tout. Le jeu ne te laisse jamais respirer.

L’application est un moteur de stress. Elle tient lieu de meneur de jeu, de sablier et de juge. Elle te force à ressentir l’urgence énergétique, non pas à la comprendre.

Et quand le temps s’arrête enfin, tu regardes le plateau et tu réalises : t’as survécu trois minutes, pas plus. Trois minutes de tension pure.

« Je veux que vous paniquiez. Je veux que vous ressentiez la peur que je ressens chaque jour. »
– Greta Thunberg (Discours au Forum économique mondial de Davos, 2019.

In Extremis est un vrai coup de jus.
Court, nerveux, intelligent — un jeu qui ose encore parler du monde sans s’excuser.
Le système en temps réel, piloté par l’appli, est un bijou de tension collective : tout le monde hurle, rit, panique.
On se retrouve à jouer à sauver une planète en carton – et on y croit.
Les 16 expériences offrent une belle variété, avec des mécaniques qui montent en complexité sans plomber le rythme.
C’est technique sans être cérébral, pédagogique sans être barbant.
Et fidèle à l’esprit Jeux Opla : propre, local, réfléchi.

Mais voilà. Quand on a goûté à Kosmopolit, difficile de ne pas comparer. Les deux partagent la même fibre, la même idée du chaos maîtrisé.
Sauf qu’ici, la mayonnaise prend un peu moins vite.
L’appli, surtout sur iPad, rame parfois. Et ce léger bug tue la tension.
Le jeu réclame un groupe investi ; sinon, c’est plat, mécanique, presque froid.
On sent le concept avant l’émotion. Pourtant, quand tout fonctionne, c’est jouissif : une coordination frénétique, une urgence partagée, un vrai shoot coopératif. C’est un jeu à sortir avec les bons partenaires, pas en fin de soirée.
Ceux qui aiment l’adrénaline ludique vont adorer. Ceux qui cherchent la zénitude peuvent passer leur tour.
In Extremis n’est pas parfait, mais on rallume l’appli.

In Extremis